travailler autrement dans les TPE : travail collaboratif ou le travail en web 2.0 ?

Depuis le mois de septembre, nous mettons en place une nouvelle structure. Du travail en quasi solitaire (indépendant pur et dur), la structure d’Ed Productions passera prochainement en SARL avec trois personnes dans les bureaux (ou à la direction), une centaine de formateurs qui gravitent autour de nous, etc. Cette évolution est l’occasion de mettre en place des procédures diverses et variées où nous tentons d’utiliser au mieux les possibilités offertes par les NTIC.

En parallèle, suite à un billet de Sylvie, j’avais demandé le Petit précis de l’efficacité collective – Travailler autrement. Ce livre blanc (bleu en réalité) de 130 pages rassemble des analyses, témoignages et réflexions sur l’efficacité du travail collaboratif… Le travail web 2.0 en fait 😉
Vous pourrez recevoir gratuitement cet ouvrage (je sais, c’est Microsoft qui est derrière, mais… après tout pourquoi pas, ne soyons pas sectaires).
Le débat proposé sur le blog EC 2006 (efficacité collective 2006) a semblé tourner court. Aucune mise à jour depuis la parution du livre et peu de commentaires dans les derniers billets… Dommage. Les limites du social promis sont-elles atteintes ?

Une lecture du livre en parallèle avec les mises en place d’outils dans notre TPE (Très Petite Entreprise) me semblait intéressante. Une TPE a-t-elle besoin ou non d’utiliser ce modèle de travail ? Première remarque, notre structure est éclatée. Même si nous avons un siège social comme toute entreprise, la gestion et l’organisation n’ont rien de traditionnel.

Plantons le décor. Les fondateurs de la SARL sont deux solos pur jus, qui veulent garder leur indépendance, aux méthodes de vente similaires (nous vendons nos prestations tous les deux seulement à l’aide d’internet). Qui plus est, nous sommes deux spécialistes du web (plutôt orienté avec la vision d’une agence de publicité pour l’un, plutôt orienté marketing pour l’autre, et une volonté de veille et de KM commune). Enfin, autonome, nous souhaitons le rester, ne serait ce que par nos lieux de résidence éloigné l’un de l’autre et par le choix de notre structure mobilière. Nous sommes de véritable «enfants» du monde du travail de l’internet, professionnels de l’information (sans le savoir notre assistante et nos formateurs sont également des pros de l’info car ils nous remontent tous des informations :-)))

Les questions rapidement évoquées pour notre organisation étaient : «quelle forme d’organisation» allions-nous prendre ? Un élément important dans cette décision était la confiance que nous nous accordions les uns aux autres, car le partage de l’information et le partage de connaissances n’est pas si simple… Nous devons passer d’un schéma : je cherche et garde l’information pour moi à je cherche et diffuse l’information à tous…

Personnellement, je connaissais le problème suite à des audits réalisés dans différentes organisations. L’une des constance a toujours été la multiplication des bases de données sur des sujets identiques et les querelles qui consistaient à dire : «je ne veux pas qu’untel sache qui je contacte, etc.» En corollaire, les bases de données aux informations identiques se multipliaient dans l’entreprise et aucune base commune, complète n’existaient.

Cela ne m’empêche pas d’avoir un mal fou à me séparer de mon système de gestion d’agenda actuel pour le basculer sur un agenda collaboratif… et je me trouve une tonne d’excuses pour ne pas m’en séparer complètement. Comportement stupide mais humain… Quelle information doit rester privée, quelle information est publique ? Jusque-là je pouvais allégrement marier les deux, car certains rendez-vous correspondaient aux deux… C’est la même chose avec le carnet d’adresse… La culture du collaboratif n’est pas innée. Loin de là.

Pourtant, dans le monde actuel, une adaptation permanente et continue de chacun est nécessaire. Déjà, les technologies évoluent chaque jour, de manière rapide et parfois de façon radicalement différentes. Ceci nous oblige à trouver des solutions souples d’adéquation entre technologie et organisation de l’entreprise. Par exemple, nous voulons garder la souplesse, la réactivité des indépendants (structure d’une personne) au sein de la SARL (structure de plusieurs personnes)…

Pour nous, le travail collaboratif efficace doit être un avantage concurrentiel en termes de vitesse, d’innovation… Mais pour cela nous devons penser le management autrement, bien loin des structures en pyramides ou autres apprises à l’école… Les modèles restent d’ailleurs à inventer. Mais d’ailleurs y aura-t-il un modèle ou des modèles tel qu’on nous l’enseigne encore aujourd’hui ? Les usages de ces outils de collaboration n’en sont qu’à leur balbutiement, même si, lorsque je travaillais pour le journal Icônes à la fin des années 80, je me rappelle avoir été attiré par le logiciel CAT, prémisse du collaboratif au niveau commercial (un CRM avant l’heure 🙂

La mise en place d’un système collaboratif doit résulter d’une réflexion globale sur les objectifs à atteindre. La tentation est forte de supprimer les anciennes méthodes et les anciens outils. Est ce raisonnable ? faut-il le faire ? Je ne le pense pas. C’est cette alliance entre ce passé récent et les nouveaux outils et méthodes qui doit être optimisé.

Après tout, si les outils n’existent pas, il n’y a pas de méthode.Donc, ne laissons pas les outils NTIC prendre le pouvoir. C’est nous qui devons décider de ce que nous apporte l’outil et non l’outil qui doit nous imposer une façon de voir. De plus, les possibilités des outils collaboratifs proposés sont tellement riches que constamment nous devons penser à mesurer l’évolution de leurs usages dans la qualité de notre travail.

L’utilisation du mail est un bon exemple… Combien sont débordés par la gestion de leur courrier électronique ? Passer moins de temps à lire ses emails, Email consideration. Là encore après l’appropriation de nouveaux usages sont à créer, voir même à disparaître : Et si l’e-mail disparaissait ?. J’avais l’impression qu’Adrien Ferro avait également mis un billet à ce sujet mais je ne le retrouve pas 🙁

Le choix de mentionner l’usage du courrier électronique n’est pas anodin.La collaboration est souvent réduite à l’email et l’usage des autres outils est quasi nul, surtout pour l’organisation des réunions, parmi les personnes qui ont répondu à l’enquête d’EC 2006…

Mais revenons à notre situation. Nous n’avons pas eu le problème que doivent rencontrer les structures existantes et qui veulent évoluer : la mise en place d’un processus pour les applications informatiques plaquées sur des processus fonctionnels existants. Chez nous, le terrain était quasiment vierge. Si nous devions faire l’analyse de l’existant, il était pour ainsi dire presque nul. Bien que, chacun de son côté, nous eussions nos propres outils et nos propres démarches.

Le choix des outils de NTIC ou de coopération est lié à notre niveau dans la configuration de ces outils (nous avons abandonné certains outils qui nous semblaient intéressants car nous n’avons même pas su les installer) et des ressources dont nous avons les capacités à mettre en oeuvre (au niveau matériel notamment, d’autant plus que nous travaillons tous sur Macintosh).

Nous réalisons l’ensemble des installations, la maintenance, la gestion de ces outils… en prenant notre temps. Un nouveau module est ajouté si nous avons suffisamment exploré les possibilités des modules précédents. Ce sont pour la plupart des outils libres ou/et gratuits que nous paramétrons pour notre usage car aucune solution ne semble prévue pour les TPE dans ces domaines !

Autres critères pris en compte dans nos décisions : l’outil doit permettre de travailler facilement avec nos partenaires et/ou nos clients en tenant compte de l’arrivée des systèmes nomades. Enfin, l’ergonomie est également l’un des éléments du choix (peu de ces outils sont réellement ergonomiques et ils sont pour certains d’entre eux d’une lenteur, mais d’une lenteur…) ainsi que la préservation voir le développement des relations humaines. Nous sommes d’autant plus attachés à ce dernier point qu’un freelance travaille seul et a appris à se créer un réseau autour de lui : sa bulle de «connaissances humaines». De plus, par différentes expériences (blog en nord, la liste de discussion des étudiants…), nous connaissons le potentiel de ces outils pour des relations humaines, sociales…

Parmi les outils que nous souhaitons mettre en place, on trouve des outils de messageries interne, des portails, des blogs, de cartographie sémantique, de gestion de tâches, d’emplois du temps et de carnet d’adresses partagés, de gestion, de gestion de documentations (sans aller jusqu’à la numérisation de tous les documents, des infos, des données), de gestion de liens, de gestion de fils RSS, de gestions de projets, de gestion de clientèles, de base de connaissances… tel que l’on peut les trouver en partie dans egroupware, Mindmanager, SugarCRM, de Joomla ou Drupal, de WordPress ou Dotclear, et d’applications de gestion plus classique que nous avons développé et mis en ligne… Il est, bien entendu, que nous n’oublions pas les bonnes vieilles technologies comme le courrier électronique, le téléphone, le papier et le stylo, y compris les rencontres physiques formelles et informelles.

Allez, histoire de râler comme à l’accoutumer, j’ai deux reproches à formuler à ce Petit précis de l’efficacité collective. Dans la classification peu enthousiaste, on trouve comme critère : «jamais d’utilisation de la messagerie instantanée ou de chat» et dans la classe des meilleurs, les motivés et bien impliqués : «utilisateurs en permanence de réseaux sociaux». Difficile pour moi de respecter cette classification. Ne jamais utiliser de messagerie instantanée n’est pas une preuve de non-travail collaboratif. J’appartiens à ceux qui refusent l’emploie du téléphone portable et du chat pour une seule et même raison, nous (dans le sens de la population des personnes qui travaillent) n’avons pas encore compris la différence entre urgence, prioritaire et standard… Avez-vous déjà remarqué comme les personnes vous demandent tout, tout de suite… Pardon, pour hier ? Ne me dite pas que c’est le monde qui s’accélère qui veut cela… je n’en crois rien !

L’autre aspect du livre blanc qui me procure quelques soucis concerne la description du futur diplômé qui pratique et s’est approprié : «le téléphone portable, l’ordinateur portable équipé de wifi, qui possède un blog, qui a collaboré à des wiki, qui reçoit ces relevés par SMS, qui téléphone via skype, qui chat»… J’arrête là. Oui, bien sur qu’ils possèdent le matériel, qu’ils pratiquent certaines de ces activités (certaines, car ils ne savent pas tous ce qu’est un wiki par exemple ; alors de là à savoir collaborer la marge est grande).

Je relativiserai beaucoup ces propos et je suis beaucoup moins optimiste que cette version utopique de la chose. D’ailleurs je me méfie beaucoup des discours que l’on entend dans les écoles : vous êtes les meilleurs (dans toutes les écoles que j’ai fréquentées et dans celle de mes amis, nous avons entendu cette phrase), vous imposerez (désolé, vous m’n’imposerez rien du tout. Tout au plus vous suggérerez dans le meilleur des cas).

Pour la plupart des jeunes que je connais, le blog c’est pour des pages persos. Les entreprises n’en font pas 🙂 Donc pourquoi voudraient-ils créer un blog en entreprise et pourquoi y participeraient-ils ? Le chat est réservé à des discussions entre amis, voir à la drague… Comment peut-on utiliser un outil de drague dans l’entreprise ? Que dire de la recherche d’informations ?

Pour pratiquer la gestion de projet de manière collaborative avec les étudiants depuis plusieurs années, je peux vous dire que ce n’est pas gagné d’avance… Que d’efforts même à déployer pour essayer de faire adopter un CMS ! Que d’efforts pour leur faire dire «ah oui, on pourrait prévoir une zone collaborative dans le site» ! Que d’efforts pour qu’ils essaient de garder un blog actif !

Ah oui, pour la petite histoire, j’ai téléchargé (pdf – 781 ko – 19 p.) et tenté de remplir (36 questions) le questionnaire de base (30 à 40 minutes prévues) mais le pdf n’est pas interactif et n’espérez pas obtenir une synthèse immédiate de vos réponses sous forme d’un profil graphique (sic), cela n’est plus possible… Le collaboratif dans la circonstance a une durée de vie inférieure à un an 🙁

Pour compléter mes propos, certains seront peut-être curieux de savoir comment d’autres réagissent :

6 comments for “travailler autrement dans les TPE : travail collaboratif ou le travail en web 2.0 ?

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