Mon interview pour Social Life n°3 au sujet de Facebook et Twitter a été coupée par manque de place (pas de soucis, je comprends ayant moi-même procédé de la sorte lorsque je travaillais au journal Icônes 😉 comme je l’indique dans eric-delcroix.com (le blog où j’indique mes publications, mes interventions…)
Mais désormais, nous, interviewé pouvons également donné l’intégralité de nos réponses 😉 C’est ce que je fais ici !
Diriez-vous que les réseaux sociaux sont un outil de communication entré dans la vie quotidienne ?
Faisons attention au sens du terme communication… Il faudrait le définir. Disons que ce sont des outils d’échanges !
Peut-on être un internaute « moderne » et sociable sans utiliser les réseaux sociaux ? Selon une étude menée par l’université de Lausanne, « être accro à Internet peut être grave mais délaisser complètement les réseaux sociaux peut également être un signe de dépression »…
Pour être un internaute “moderne” et sociable, je répondrais non, on ne peut pas. Mais pour aller plus loin, être internaute lambda aujourd’hui demande à être présent sur les réseaux sociaux car sans tomber dans l’excès, la présence dans les réseaux marque à plus d’un titre une certaine socialisation et demain Internet sera basé exclusivement sur des réseaux sociaux, en remplacement de nos carnets d’adresses,, donc autant s’y mettre aujourd’hui.
Certains prétendent que les utilisateurs de Facebook n’ont pas de vie sociale (d’où le « palliatif »), d’autres que les utilisateurs de Facebook ont au contraire une grande faculté à aller vers les autres et auraient un cercle de relations sociales très larges. Où se situe la vérité selon vous ?
Le côté palliatif était la crainte à l’arrivée des réseaux, mais, depuis, la plupart des études tendent à prouver que les utilisateurs de Facebook et des autres réseaux sociaux ont une vie sociale beaucoup plus riche dans la vraie vie (IRL) que ceux qui ne les utilisent pas.
Les réseaux sociaux par la force des choses étendent ou donnent l’impression d’étendre son cercle de relation. En réalité, souvent ce sont les liens faibles de nos connaissances (par opposition aux liens forts : famille, amis proches) qui font notre réseau. Et c’est dans ces liens que viennent éventuellement s’ajouter des contacts virtuels !
Toutefois, je ne tomberais pas dans l’excès inverse en disant que cela leur facilite à aller vers les autres. Je connais des community managers qui sont des introvertis et qui le resteront. Pourtant, il possède une certaine aura sur le net !
Selon vous, utiliser Facebook favorise-t-il réellement la sociabilité ? Est-ce un vrai moteur de vie sociale ?
Je n’irais pas jusqu’à dire que c’est un moteur de vie sociale mais il offre le gros avantage de casser la glace lors de la rencontre dans la vie de tous les jours. Il m’arrive de croiser des connaissances virtuelles qui résident au Canada IRL en France. Le dialogue s’instaure de suite car nous nous connaissons “déjà” ! C’est ça l’effet Facebook dans la sociabilité entre les personnes. Une connaissance de l’autre au travers de ses informations.
De plus, Facebook est une porte ouverte sur le monde entier. Je réside à Lille et j’ai des amis sur l’ensemble de la France, de la francophonie à travers le monde et aussi quelques Allemands, Américains…
Que diriez-vous à un « novice » qui s’interroge sur la pertinence d’aller ou non sur les réseaux sociaux comme Facebook ?
Pourquoi ? Afin de lui fournir une réponse adéquate à ses craintes (car sinon, pour quelle raison ne serait-il pas dans un réseau social !). Mais, je ne me fais pas d’illusions. Il y aura toujours de réfractaires à ces réseaux qui au fil du temps accepteront de les utiliser.
Rappelons nous simplement ce que la plupart des internautes disaient concernant l’usage de Google autour de l’an 2000. «Non, je n’utiliserais jamais Google», Google était le démon de l’époque comme l’est aujourd’hui pour certain Facebook. En 2012, mis à part quelques exceptions, qui n’emploie pas Google au quotidien ?
Même en réglant correctement les paramètres, pensez-vous que l’on puisse efficacement protéger ses données et préserver sa vie privée ?
La première question à se poser est : qu’est ce que la vie privée ? Elle est différente pour les uns et les autres en fonction de son âge et de ses activités. Un exemple : on trouve toutes mes coordonnées, de façon ouverte dans Facebook. C’est pour moi un outil de travail ! Cela n’est pas pour moi du domaine du privé. Par contre, je ne parle pas de mes opinions politiques. C’est un choix de ma part. Mais, est ce que la meilleure des protections n’est pas d’être responsable de ce que l’on publie ? des groupes auxquels on adhère ? et surtout d’assumer ses choix. Les réseaux sociaux d’une manière générale abolissent la notion du “je ne savais pas que… !”
Même s’il est possible de protéger ses données et de régler la confidentialité, certains reprochent à Facebook, avec l’aspect communautaire, son côté voyeuriste (stalking, etc.). Selon vous, peut-on réellement utiliser ce réseau sans épier ou être épié ? Doit-on réellement s’en inquiéter ?
Lorsque nous avions effectué une enquête avec Lionel barbe pour un article universitaire, la première raison de l’usage de Facebook était pour savoir ce que faisait l’autre. Depuis rien n’a changé, si le nom…
Mais, je crois qu’au-delà de focaliser sur le simple réseau, facebook en l’occurrence, il est désormais important de penser en termes de présence générale sur le web. Ainsi, sans rentrer dans les détails, il est assez simple souvent d’associer une personne entre un site de rencontre ou un réseau social par une recherche par les images dans Google Image. De même, toujours dans le domaine de l’identité numérique, il est possible d’effectuer une recherche sur certains services sur la présence dans les réseaux sociaux en fonction des adresses de courrier électronique.
Mais, est ce que le stalking n’est pas non plus une tendance générale actuelle (et pas seulement dans les réseaux). Il est possible de surveiller la baby sitter, de surveiller le téléphone portable de son enfant ou d’une personne…
D’ailleurs, parlant d’enfants, les parents amis de leurs enfants sur Facebook, ce n’est pas du stalking ? Non, bien sûr répondront les personnes concernées. C’est simplement pour les surveiller ! Et où est la vie privée du jeune dans cela ?
Et pour répondre à votre question, nous ne pouvons pas utiliser ces réseaux sans être épié. Mais là encore, Twitter à mon avis est pire. En 140 caractères, on dit j’ai vu untel à tel endroit, des personnes s’immiscent dans la discussion alors qu’ils sont voisins de table dans un café. Ce sont des situations qui se sont déjà produites me concernant. Jamais dans Facebook !
Faut-il s’en inquiéter ? Cela rejoint l’une des questions précédente. À chacun de savoir ce qu’il publie sur le réseau…
Doit-on considérer le stalking comme l’un des moteurs de Facebook ?
Effectivement, le stalking est certainement l’un des moteurs de Facebook, mais ce n’est pas le seul. Heureusement.
L’utilisation de Facebook est-elle un peu « narcissique » ?
Dans un certain sens, oui, l’utilisateur de Facebook est narcissique : il cherche à se faire “ aimer”. Toutefois, je ne suis pas certain qu’il passe son temps à se contempler. Enfin, la plupart du temps car des exceptions existent !
D’après votre vécu et les témoignages reçus, crée-t-on réellement un profil Facebook fidèle ou embellit-on un peu sa vie ?
L’internaute crée son profil dans Facebook tel qu’il croit être selon ses propres critères d’importance tout en essayant de cacher ce qu’il considère être ses défauts !
Pensez-vous qu’une utilisation strictement professionnelle de Facebook soit possible pour un particulier (suivi des news, collecte d’infos, carnet d’adresses, etc.) ?
Le terme qui me dérange dans votre question est strictement. Pour moi, la vie d’aujourd’hui notamment dans les réseaux sociaux n’est plus faut-il ou non utiliser Facebook ou un autre réseau de façon professionnelle ou privée. Il existe une frange entre ces deux mondes qui coexistent et qui font justement la richesse de tous ces réseaux. C’est ce que j’appelle le syndrome de la machine à café dans l’entreprise. On y parle de tout sauf de boulot avec les gens qui sont présents. C’est cet univers qu’il faut réussir à recréer dans les réseaux sociaux et notamment dans Facebook entre ce que l’on peut qualifier de professionnel et de personnel.
Sinon, sur l’utilisation à des fins professionnels de Facebook, je répondrais oui. C’est le cas pour beaucoup d’indépendants par exemple.
Jugez-vous l’utilisation des réseaux sociaux pertinente pour les professionnels de l’information ? On reproche à Twitter de lancer des rumeurs comme une traînée de poudre et de créer, parfois, un buzz factice… « Les réseaux sociaux sont-il compatibles avec le journalisme » (pour citer les Assises du journalisme) ?
Le monde des professionnels de l’information ne se limite pas aux journalistes, outre les documentalistes par exemple, on peut aussi y ajouter les curators et autres influenceurs du web.
La première remarque concerne Twitter. Fait-il parti des réseaux sociaux ou est-ce un pur produit du web temps réel ? Je pencherai pour ma part pour la seconde réponse. Les usages ne sont pas les mêmes !
Aussi, je répondrais en deux temps sur l’usage de Twitter et des réseaux sociaux par les journalistes. Il est désormais acquis que l’actu se fait dans Twitter. Pour mémoire, l’AFP a eu l’information de la “mort de Mickael Jackson” dans Twitter, l’arrestation de DSK, l’avion dans la baie d’Hudson, c’étaient dans twitter, etc.
Et surtout, ce sont les journalistes en discutant dans twitter qui font l’actualité dans ce média. Le tweet de Valérie Trierweiler à fait couler beaucoup de messages à l’époque. Mais, avait-elle tort de publier l’information à cet endroit ? Tous les journalistes y sont présents !
Pour le côté rumeurs, le souci est surtout qui vérifie et à quel moment doit être vérifiée l’information. Et, j’ai plus de mal à m’expliquer le rôle des journalistes. Comment des rumeurs peuvent être diffusées par de “grands médias” ! Ce n’est pas un moyen d’écarter le débat, au contraire. Si une rumeur prend de l’ampleur, c’est très souvent que des influenceurs, journalistes ou non, ont relayé cette information pour en faire un véritable buzz.
Je peux donner des exemples, j’avais reçu rapidement l’information pour DSK, mais je n’ai rien diffusé, ne connaissant pas les sources exactes. J’ai dans mes tiroirs quelques “scoops” dont je ne peux vérifier la vérité sans une enquête. Certains le publieraient… Pas moi. Cela amène aussi à parler de l’éducation aux médias sociaux, à l’usage de ses outils dès le plus jeune âge qui manque cruellement en France. On apprend bien aux enfants à traverser une rue, il serait temps de leur apprendre à circuler sur les autoroutes de l’information.
Enfin, pour clore le point sur Twitter, je recopierai ce qu’a mis un journaliste dans son profil sur cet outil : Twitteur de ce que je lis ailleurs que je ne lis pas dans nos grands médias. Car avant tout, Twitter est une source d’informations !
Pour l’usage à proprement parler des réseaux sociaux, cela m’évoque souvent le carnet d’adresses que possédait le journaliste dans le passé. Il pouvait joindre la personne qu’il souhaitait et être tenu au courant de ses activités. C’est ce qui a, pour beaucoup de monde, donné l’image de la possibilité du journalisme citoyen (en plus, désormais quiconque peut s’exprimer sur le net).
Alors, en résumé, oui, l’utilisation des réseaux sociaux est pertinente et recommandée pour les professionnels de l’information à la condition qu’eux aussi apprennent à les utiliser.
Pour une marque, croyez-vous à l’utilisation de Facebook comme outil de promotion ? Dans le cas d’une marque bien établie, que peut réellement apporter de plus une page Facebook ?
L’utilisation de Facebook par les entreprises est un domaine important. C’est selon moi une clef de voûte du succès du réseau. Une manière de voir le succès de ce réseau est d’ailleurs de constater qu’il a eu appropriation à la fois par l’homme de la rue et par les entreprises.
Dans le monde du commerce, pas seulement du e-commerce, on parle beaucoup ces derniers temps de social pour le CRM, pour le référencement, de social shopping… Facebook évidemment est à la pointe de ces domaines en plus de celui de la promotion. Il existe une multitude de solutions pour mettre en place une présence dans Facebook pour les entreprises depuis la page, le groupe, les événements, les jeux…
Kiabi vient de lancer par exemple en France une possibilité depuis le magasin d’envoyer la photo dans la tenue que l’on essaye à ses amis Facebook afin qu’ils donnent leur avis !
Quelle que soit la marque, établie ou pas, le but est d’être en contact avec ses “fans” et d’obtenir des échanges avec eux. On parle beaucoup de communauté dans cette situation, mais je n’aime pas beaucoup le terme. Il faudrait mieux parler en termes de clients, prospects et leads qui sont des termes marketing qui correspondent mieux à la situation. Cela donne certainement une image de modernité aux marques présentes dans ce réseau, et, ce qui n’est pas négligeable, pourquoi se priver de communiquer à un endroit où se situe leur cible !
Que répondez-vous aux détracteurs de Facebook qui dénoncent une coquille vide (statuts insipides, avalanches d’invitations, commentaires d’articles systématiquement critiques, groupes inutiles, etc) et une activité chronophage ?
Là encore plusieurs questions en une seule. Je m’oppose toujours en faux sur l’utilisation chronophage de Facebook à un tel point que j’ai mesuré le temps que je passais sur une semaine dans les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Tumblr…). Chaque jour, je suis une demi-heure dans les réseaux. Ce chiffre a été confirmé par un cabinet de délégation de community manager. Les CM de cet établissement passent une demi-heure environ par jour dans les réseaux. Ce que j’ai remarqué par contre dans l’usage des internautes est la propension qu’ils ont à jouer dans Facebook ! Peut-être que c’est le jeu qui est chronophage ! je dois reconnaître que cela dépend aussi de l’utilisation que l’on a de Facebook. Si par exemple, il vient en remplacement de MSN, il est évident que les personnes passeront plus de temps. Mais est ce Facebook qui est chronophage ou l’utilisation d’un service de chat ? N’oublions pas que Facebook regroupe beaucoup d’outils disparates par le passé : partage d’image, de vidéo, courrier électronique… et jeux !
Quant aux autres détracteurs, rien ne les oblige à suivre une personne pour éviter les contenus insipides ; que pour les invitations, on peut stopper l’envoie de celle-ci en refusant systématiquement les propositions de jeux et d’applications ; qu’ils ne sont pas obligés de s’inscrirent à des groupes inutiles et au contraire, je les invite à créer des groupes utiles puisqu’ils ne semblent pas exister et pour les articles systématiquement critiques, on peut noter que les entreprises ont en général très peu de commentaires négatifs. C’est un constat et pas seulement parce que dans certains cas, ils sont modérés. Bref, je pense que les détracteurs montrent surtout une méconnaissance en général de Facebook. Là encore une éducation serait peut-être nécessaire à moins que les réseaux sociaux ne les dérangent par la remise en cause de leur position ou de leurs pouvoirs ?
Que répondez-vous à ceux qui accusent Facebook de ne chercher qu’à établir une base de données à destination des publicitaires, de façon à mieux cibler les annonces en fonction du profil et des habitudes de consommation des utilisateurs ?
Ils n’ont pas tort. Mais, ce principe de CRM existe depuis l’apparition de la VPC (Vente par correspondance). Tentez de téléphoner à un service d’accueil de vendeur sur catalogue. Je suis certain qu’il vous posera des questions pour mieux vous connaître. C’est la même chose pour Facebook. À nous de l’apprendre, de le contourner au besoin.
Les réseaux sociaux comme Facebook posent-ils selon vous de nouvelles problématiques de communication ? Si oui, lesquelles ?
Comme je le précisais au début de mes réponses, il faudrait définir la communication.
Mais si je prends le modèle de communication de Shannon et Weaver, des différences existent. Nous ne savons pas toujours si c’est un ou des récepteurs que nous aurons et qui ils seront,, si le message sera lu dans l’instant ou plus tardivement…
Aucun modèle ne semble adapté à ma connaissance !
Mais, au-delà de la communication, c’est sa vie de tous les jours qui est impacté pour l’individu (dans l’entreprise, l’arrivée des réseaux sociaux impacte toute la hiérarchie, les systèmes d’information, le pouvoir de chacun).
Je peux prendre l’exemple dans l’enseignement. Lorsque je rentrai d’un cours donné à la fac, parfois je voyais des messages du genre : Delcroix à dit : “ ! J’ai appris à manier le off. C’est une question de confiance entre les étudiants et moi. Dans la même veine, les étudiants laissaient des commentaires pendant les cours sur d’autres enseignants… mais ceux-ci ne possédaient pas Facebook.
Il y a aussi les problématiques liés à l’interculturalité… lorsque nous échangeons avec une personne d’une autre culture, les références et les valeurs ne sont peut-être pas les mêmes.
La disparition du vouvoiement peut-être considéré comme une problématique au même titre que l’éventuelle rediffusion d’une information (non destiné à faire du buzz !)
La communication ouverte à tous… Les parents autorisent les enfants de moins de 13 ans à s’inscrire, sans toujours savoir qu’il existe une grosse partie très “érotique” dans Facebook (en principe, la pornographie est interdite, mais ces derniers mois des images plus que suggestives commencent à apparaître).
La problématique de la mort : que faire d’un profil Facebook (connu ou inconnu) d’une personne qui décède ? Un mémorial comme proposé dans Facebook ? conserver la page en l’état ? répondre aux commentaires ?
Vous le remarquez la liste peut-être longue. Mais laissons le soin aux universitaires, journalistes ou autres spécialistes de plancher sur ses sujets !
Facebook est très prisé d’un jeune public. Selon vous, est-ce LA forme d’expression d’une génération ? (phénomène durable ?) Dit-elle beaucoup des préoccupations des ados d’aujourd’hui ?
Ce qui est amusant dans la question est qu’au début de Facebook, les jeunes ne voulaient pas y venir car on ne pouvait pas changer le décor ! Cela a bien changé effectivement, même si le mouvement actuel est un passage des jeunes (y compris des collégiens dans Twitter). Je ne crois pas pour autant que Facebook est la forme d’expression d’une génération. Je crois surtout que les jeunes, je parle ici de la génération Z, les 0-18 ans, sont de vraies digitals natives et qu’ils utilisent les outils qui sont à leur disposition. À l’époque des blogs déjà, la génération précédente, utilisait massivement les skyblog, MSN… Les jeunes Z emploient Facebook, Twitter, Pinterest… Rien de surprenant de mon point de vue !
Juste une remarque, qui rejoint un propos tenu précédemment, ils quittent parfois Facebook au profit de Twitter car ils s’y sentent espionner par leurs parents… Peut-être aussi un signe des temps et de la maturité numérique des jeunes qui est bien meilleure que ce que l’on peut entendre bien souvent !
Je n’ai pas beaucoup l’impression que l’on puisse se baser sur Facebook pour analyser les préoccupations actuelles des jeunes. C’est avant tout pour eux l’univers des copains et la poursuite de la cour de récré, auquel on peut ajouter leurs passions (ce sont des grands fans des marques !) Donc, un intérêt commercial évident, mais de là à en tirer des conclusions sur leurs préoccupations, il y a un pas que je ne franchirais pas.
N’oublions pas également que Facebook est aussi très proche de l’instant.Une information dans Facebook si elle possède une durée de vie supérieure à celle de Twitter, celle-ci n’en reste pas moins éphémère et reflète souvent l’instant présent !
Croyez-vous à une sociologie des utilisateurs de Facebook (éditeur de statuts compulsif, voyeur, spammeur, lecteur passif, etc.) ou l’utilisation que l’on fait du réseau ne fait-elle qu’épouser le caractère de chacun ?
Je ferais une réponse de Normand, cela dépend des individus. Certainement, la structure et les usages de Facebook accentuent le caractère de chacun. Mais, comme je le dis parfois en conférence, si je fais le parallèle entre une salle devant moi et des utilisateurs de Facebook, dans le premier cas, quelle que soit la conférence, ce sont presque toujours les mêmes qui posent les questions, ce sont presque toujours les mêmes qui “discutent” dans Facebook…
A propos de Facebook, Judith Donath (Sociable Media Group) parle de « toilettage social » (on maintient facilement le contact avec les relations que l’on n’a pas le temps d’appeler ou de voir). Etes-vous d’accord ? Si l’on parle de « toilettage », doit-on considérer que l’on n’entretient pas vraiment les relations, que c’est un substitut facile ?
Non, loin de là. Son propos s’appuie sur le concept des liens forts et des liens faibles. Un concept sociologique issu de l’expérience du petit monde de Mark Granovetter. En 1973, il a démontré que des cadres en recherche d’emploi trouvaient plus facilement et plus rapidement un poste en s’appuyant sur leurs liens faibles (environ 60 %).
les liens forts sont nos amis, notre famille, nos collègues ; les liens faibles sont les contacts avec qui nous passons peu de temps et où l’émotionnel et l’affectif est peu présent voire inexistence. Si les liens forts sont à l’origine de la cohésion sociale, les liens faibles que l’on trouve justement à haute dose dans Facebook favorisent l’intégration sociale et la circulation d’information.
Donc, rien à voir avec un substitut… Ces relations sociales existent également dans la vie de tous les jours : la boulangère par exemple !
Certains utilisateurs conseillent de couper de temps en temps avec sa communauté Facebook, par exemple en désactivant son compte. Ces pauses vous paraissent-elles indispensables ou du moins souhaitables ?
Honnêtement, je ne vois pas l’intérêt de se couper aussi radicalement de Facebook. Ils se coupent des autres réseaux, ils suppriment leur abonnement à Internet ? On peut aussi supprimer la télévision, la radio, la presse écrite ou de boire son café, de manger du chocolat ! On peut aussi se poser la question du bienfait d’aller passer un séjour en ermite dans une forêt reculée.
Soyons plutôt raisonnables. Je pense qu’il faut apprendre avant tout que Facebook et les réseaux sociaux sont des outils comme les autres. Nous devons apprendre à vivre avec eux, et parfois sans eux. Cela m’arrive d’être un week-end sans me connecter ou parfois, être plusieurs jours en vacances sans regarder ce qui se passe dans sur la toile !
Mais, encore une fois, c’est certainement l’éducation à ces nouveaux outils qui est importante. Regarder le nombre d’articles sur Internet sur la manière de gérer au mieux sa messagerie électronique en indiquant d’y passer une ou 2 fois par jour. Nous devons pour les réseaux sociaux apprendre une hygiène de vie sociale !
Quel avenir voyez-vous aux réseaux sociaux type Facebook ?
Je vais peut-être vous surprendre, mais pour moi, ils sont déjà du passé dans l’état. Ils le sont depuis l’arrivée de Google Wave. À l’époque, tout le monde focalisait sur les possibilités de travail synchrone dans Wave et personne n’a remarqué que dès notre arrivé dans cet outil, un réseau social était mis en place par Google, de l’ensemble de vos relations !
Depuis, l’émergence du Web Temps Réel, dont Twitter est le flambeau, est passé par là. La géolocalisation est apparue, la mobilité est en train de tout balayer (ce n’est pas un hasard si lors de l’une de ces dernières interventions, Mark Zuckerberg insiste sur la priorité du mobile) ainsi qu’une nouvelle manière de “lire” l’information avec l’effervescence autour de Pinterest, d’Instagram… sans parler des vieux Flickr, Twitpic, etc. qui risquent de revenir sur le devant de la scène !
Les réseaux sociaux du type Facebook auront eu leurs heures de gloire, un peu comme les blogs aujourd’hui, à moins, qu’ils ne prennent la place d’agrégateur de contenu des médias sociaux (n’oublions pas que Facebook a racheté en son temps Friendfeed) et que demain, il faudra une interface pour se connecter au web. Pourquoi pas un Facebook qui contient tous les ingrédients pour le faire !