C’est la saison des mémoires et autres travaux pour les étudiants de licences, de masters… Normal donc que je réponde à quelques demandes de leurs parts.
Aussi quand Amélie m’a demandé de répondre à quelques questions sur la génération Z, difficile de résister à la satisfaire alors qu’elle écrit : «Tout d’abord sachez que je suis votre travail de près depuis plusieurs mois. Votre blog est dans ma page de démarrage, c’est pour dire.» De plus, son questionnement concerne l’un de mes sujets de prédilection du moment : la génération Z 😉
Son mémoire a pour thème : la génération Z et comment la fédérer autour d’une communauté web.
Voici donc mes réponses à son questionnaire sur la génération Z (pour ceux que le sujet intéresse, je vous rappelle que j’ai ouvert le blog Génération Z, qui sont-ils dans lequel j’essaye d’assurer une revue de presse sur cette génération et en annexe proposer mes services pour vous faire découvrir cette génération 😉
Au fil de mes recherches, je me suis rendu compte qu’on parlait encore trop peu de la génération Z. Pourtant, cette génération fait déjà partie intégrante de la société. Pensez-vous que les entreprises ont déjà opéré un virage vers la génération Z?
Premièrement, il serait bon de réfléchir pourquoi on parle peu de la génération Z plus spécialement dans le monde francophone d’ailleurs, car c’est beaucoup moins vrai dans le monde anglo-saxon, notamment en Australie, Angleterre, dans les pays d’Asie…
Plusieurs raisons expliquent ce phénomène à mon sens.
Pour commencer, il y a eu, et cela continue, le matraquage que nous avons subi sur la génération Y avec au fil du temps une évolution sur leurs caractéristiques afin de faire coller l’image à nos souhaits et le dérapage dès que l’on a commencé à les appeler digital natives (les vrais digitaux natifs sont la génération Z, ils ont toujours vécu pour le coup avec le numérique).
Autre raison, la perméabilité qu’il y avait entre les différentes générations notamment X et Y. Je m’explique : on pouvait être un X avec un comportement d’Y et inversement. Je pense que ce sera beaucoup plus difficile avec la génération Z.
Un phénomène en réaction à l’appropriation du concept de génération des sociologues par le marketing évidemment a joué son rôle. Pour certains, désormais, les générations n’ont de sens que dans le domaine du marketing et non de la sociologie. Ceci d’ailleurs à conduit à la remise en cause de la « légitimité » des réflexions sur le concept de génération et sur l’existence des générations.
En fonction de ce que je viens de dire, pour ce qui est des entreprises, elles sont loin, très loin de s’intéresser au concept de la génération Z même si je commence à avoir quelques demandes à ce sujet.
D’ailleurs, quand on voit que la presse nous présente encore des articles sur la génération Y comme la génération d’avenir, les dirigeants d’entreprises ne sont pas aidés dans le domaine.
Donc, le virage de la génération Z dans l’entreprise, malheureusement, sera pris, non pas comme une belle courbe avec la visibilité nécessaire dès l’entrée du virage, mais comme une épingle à cheveux, avec les dangers et les morts que cela comportent.
C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai mis en place le blog generation-z.fr afin de mettre en garde les entreprises (niveau Ressources Humaines et marketing) mais aussi la société en général, car l’arrivée de la génération Z à l’âge adulte aura des répercussions dans pas mal de domaines y compris l’éducation, le commerce et le retail, etc.
Il y a une grosse confusion entre génération Z et génération C. Pensez-vous que cette confusion est préjudiciable dans les stratégies marketing des entreprises ?
J’évoquais dans ma réponse précédente la prise en main par le marketing de la notion de génération. La génération C en est un exemple parfait.
Resituons ces générations (vous pouvez consulter la frise des générations ici). La génération Z correspond aux personnes nées entre 1995 à 2010 (la génération qui suit est la génération A pour Alpha). La génération C est à cheval sur la génération Y et la génération Z (schématiquement nés entre 1990 et 2000). Elle n’a de raison d’être que d’un point de vue marketing afin de cibler étudiants du supérieur et les jeunes salariés.
Pour les entreprises, si les services marketing ont compris le sens de cette segmentation, cela ne me pose pas de problèmes. C’est la situation, je pense dans les grosses entreprises.
Par contre, pour les PME et les TPE, il n’en est certainement pas de même. La confusion est grande. Il suffit de regarder le mélange que nous fait régulièrement la presse française spécialisée ou grand public à ce sujet. Il est à mon sens impossible à la plupart des décideurs de stratégies marketing de prendre la mesure de ces évolutions et de comprendre les nuances qui peuvent exister entre les uns et les autres. Ceci est d’autant plus vrai que je fais partie de ceux qui crois qu’une génération ne commence pas à un instant T pour se terminer à un autre moment précis. Une forme de flou existe entre deux générations… mais pas sur 10 ans !
La génération Z a ses codes et ses rites. Quelles sont pour vous les valeurs auxquelles elle accorde le plus d’importance ?
En effet, la génération Z possède ses codes, ses usages, ses rites.
Je commencerai par le plus évident : leur connexion régulière à Internet. Ils ne peuvent vivre sans ! Toute leur communication passe par ce média, notamment le mobile, au détriment des sites web traditionnel ! L’ordinateur n’est plus leur objectif ! C’est le smartphone désormais.
En second, j’indiquerai leur maturité dans l’usage d’Internet et notamment des réseaux et médias sociaux. Depuis que j’interviens dans des séminaires ou des conférences sur les réseaux et médias sociaux, j’explique l’arrivée de l’avis des pairs, des pro-am (professionnels amateurs)…
Avec la génération Z, plus besoin de voir venir l’arrivée… Ils vivent le web 2.0 comme ils respirent à l’exclusion de tout autre système.
Ainsi pour eux, plutôt que de rechercher une réponse sur Google, ils préfèrent demander l’avis à des amis virtuels par exemple.
Autre modification dans les concepts « d’amis » sur Internet, toutes personnes présentes sur la toile sont nécessairement disponibles pour leur répondre, sinon, pourquoi elles seraient sur le net ? Ah oui, j’oubliais, ils considèrent que tout le monde est connecté comme eux 24 h sur 24, 7 jours sur 7 !
Si les générations précédentes fonctionnaient en mode cercle d’amis sur Internet, la génération Z à un mode de connexion aux autres en étoiles (je prends contact avec telle personne, car elle peut m’apporter telle réponse !)
Concernant leur travail, les études tendent à prouver qu’ils veulent travailler « réellement » dans ce qui leur plaît. L’idéal étant pour eux de transformer leurs loisirs en métier ! En corollaire, comme ils sont entreprenants, ils désirent créer leurs entreprises ou être associés à la direction… Pas facile à gérer pour les entreprises qui auront beaucoup de difficultés à les conserver comme salariés.
On est à des années-lumières de ce que j’entends en général les concernant pour leur arrivée en entreprise : «Bah, comme pour les autres, on va tirer profit de leurs connaissances des médias sociaux et les mater !»
Autre facteur à mon avis très important, la communication par l’image. Si, les personnes de mon âge, la cinquantaine, notre communication était à base de plume et de papier, déjà avec la génération Y, cette communication avait évolué vers le chat et la webcam. La génération Z franchit un pas supplémentaire avec l’image et la vidéo (on parle peu de l’oral, mais pourquoi pas, surtout si l’on entrevoit la disparition de l’écriture manuscrite à laquelle ils participeront très certainement).
Sinon, ils sont écolos (certainement due à leur éducation), travaillent en groupe (ils l’ont appris dès l’école à la différence des générations précédentes), refusent l’injustice et la corruption, sont très tolérants : pas raciste, pas homophobe… mais ils ne supportent pas qu’on les trompe.
L’un des paradoxes qui les concernent est qu’ils sont très individualistes, mais ils se retrouvent autour de causes communes qui les intéressent.
Curieux et autodidactes, ils sont très créatifs et inventifs… Des études indiquent des changements profonds dans leurs habitudes de consommation et dans leur vie : moins d’alcool et de drogue (l’image dans les réseaux est importante ;-), le retour des activités cuisines, le désintérêt pour les voitures, ils resteront « tard » chez leurs parents…
Je pourrais continuer longuement la série de leurs caractéristiques, de leurs valeurs… mais je vous invite à vous rendre sur le blog generation-Z.fr pour compléter 😉
Pensez-vous qu’il est plus facile de fédérer la génération Z autour d’un support (réseau social par exemple) ou autour d’un concept ?
Il ne faut pas confondre fédérer autour d’un support comme le réseau social et utiliser un outil de réseau social. La particularité des jeunes de la génération Z est d’utiliser les outils qui sont mis à leur disposition.
Il y a quelques années, ils se sont retrouvés sur Facebook. Même si le réseau social par excellence connaît une diminution de son utilisation, les jeunes continues de l’utiliser. Mais depuis la belle époque (3-4 ans), désormais, ils sont passés sur Twitter pour maintenant être sur SnapChat.
La difficulté ou la différence par rapport aux générations précédentes est que dans les années précédentes, un outil était adopté par toute une génération pendant un laps de temps assez long. Ce n’est plus vrai avec la génération Z qui est capable d’adopter rapidement de nouveaux modes de communication.
En Allemagne, les Universités utilisent WhatsApp pour communiquer auprès des étudiants ! Ce service est encore peu utilisé en France ! Mais la vérité est là, les entreprises ne vont plus pouvoir se contenter de communiquer sur un réseau social. Elles vont devoir tester par de petites campagnes telle ou telle nouvelle application qui aura le vent en poupe afin de suivre la génération Z et utiliser ses outils. Car pour eux, un service de médias social est avant tout un outil pour communiquer, échanger…
Et à l’entreprise d’adapter son discours à la génération Z, autrement dit, ne pas chercher à leur vendre quelque chose, mais à devenir leurs » potes ».
Donc, pour répondre clairement à votre question, il est possible de fédérer les générations Z dans un réseau social, encore faut-il savoir lequel ! Mais effectivement, c’est dans les réseaux et médias sociaux que se trouve l’avenir des entreprises qui souhaitent toucher ce public.
Pour la seconde partie de la question, en effet, l’idée de les rassembler autour d’un concept me semble plus facile. Mais, là encore, attention aux désillusions. Je les vois souvent se rassembler autour de concepts ou de communautés qui leur sont propres, qu’ils ont édifié eux-mêmes selon des critères qui généralement nous échappent, mais qu’eux perçoivent !
Et, c’est peut-être sur ce point que les entreprises peuvent bâtir leurs communautés, leurs leads… en intégrant ces univers et en y répondant sous forme de dialogue… Attention, je ne dis pas que les entreprises doivent vendre… Elles sont là avant tout comme « amies » de la cause !
Est-ce que la génération Z se regroupe facilement en communauté? Si oui, autour des quelles pourrait ce être ?
Fondamentalement, la génération Z n’est pas très différente des autres générations. De ce point de vue, la génération Z reste fidèle au précepte : l’homme est un animal grégaire !
Donc, oui, ils se regroupent facilement en communauté, j’allais ajouter d’intérêts, dans le sens où cela doit répondre à leurs attentes et les intéresser réellement.
J’ai la chance de voir les évolutions d’un site comme diy.org (Petite pub pour l’une de mes filles qui explique DIY.org) où le slogan est « Découvre tes talents. Impressionne ton monde » qui correspond aux attentes de pas mal de personnes de la génération Z 😉